« Le confinement c’est notre vie habituelle, la différence c’est la dimension spirituelle. »
Un triste matin confiné de décembre, j’allume l’ordi, d’un geste automatique je regarde ma messagerie, entre deux bêtises qui réjouissent peu subtilement ces temps maussades, un message de mon amie Joséphine qui m’alerte sur l’état de grande difficulté financière que rencontrent les Sœurs Clarisses de Bastia « Je connais bien la mère, me dit-elle, nous sommes de la même génération. ». Je pose quelques questions, pour comprendre les raisons d’une telle situation et j’apprends, éberluée, que le Monastère étant autonome, elles ne reçoivent aucune aide de l’évêché et que leurs seules ressources pour faire face aux énormes frais d’entretien du vétuste couvent de 3 000 m2, sont la vente des hosties aux paroisses, quelques confitures, la petite pension de leur unique Sœur aînée, l’accueil spirituel pendant l’été d’un nombre restreint de vacanciers, un peu de couture et la générosité de leurs bienfaiteurs. Depuis le début de la crise sanitaire en mars, la petite communauté est donc privée de ses modestes rentrées d’argent, alors que, comme pour une grande partie de la population, les frais continuent à courir. Je propose de contacter sœur Claire-François, la mère supérieure, pour faire un reportage, vivre à leur rythme le temps d’une journée, raconter leur quotidien et évoquer leurs difficultés. Quelques matins plus tard, équipée d’un masque FFP2, je sonne à l’entrée du Monastère, dans les hauteurs de Bastia, c’est l’aube, un froid brouillard nimbe la silhouette de Sœur Claire -François qui m’attend sur le perron. Elle m’accueille avec une grande gentillesse et me présente les six autres religieuses, âgées de 44 à 96 ans, avec qui elle partage sa vie. Nous nous saluons en silence dans la pénombre de la petite chapelle, l’air est glacé malgré quelques chauffages. Chacune prend sa place, emmitouflée dans un poncho ou une veste épaisse.
Texte et photos Rita Scaglia